24 Juin 2021

[ENTRETIENS] Des utilisateurs en toute sécurité grâce aux services SAR/Galileo

Vous envisagez une croisière autour du monde, un trek en solitaire au milieu du désert ou la traversée du Brésil en VTT ? Si vous veniez à vous perdre : les balises de détresse du programme Cospas/Sarsat sont là pour vous retrouver !

De gauche à droite : Sylvain Delattre, Chiara Scaleggi et Maxime Fontanier

Fondé par quatre pays, dont la France, le Programme Cospas/Sarsat regroupe aujourd’hui 45 États. Il a pour mission la recherche et le sauvetage de personnes en détresse, partout dans le monde. A l’activation de la balise par l’individu en difficulté, le signal est relayé via une constellation de satellites de navigation, jusqu’à un réseau de stations de réception qui collectent, localisent et distribuent le signal, au centre de sauvetage le plus proche.

Le service Search and Rescue SAR/Galileo joue un rôle considérable dans le programme Cospas/Sarsat, en particulier grâce aux charges utiles SAR déployées sur les 24 satellites de la constellation Galileo et un réseau de stations sol déployées en Europe. Cette contribution de la Commission Européenne réalisée avec le support du CNES et de ses partenaires a permis de considérablement améliorer la précision et la vitesse de détection des signaux de détresse.

Alors que de nouvelles fonctionnalités du service se profilent à l’horizon, trois membres du projet SAR/Galileo, ont accepté de faire un point d’étape sur les évolutions majeures du moment : rencontre avec Chiara Scaleggi, Sylvain Delattre et Maxime Fontanier.

Au programme, trois sujets :

  • La mise sur le marché de balises compatibles avec le « Return Link », le service qui permet de confirmer aux personnes en détresse que leur signal d’alerte a été reçu et localisé.
  • Le service « Remote Beacon Activation », qui permet d’activer depuis le sol des balises aéronautiques et de localiser les avions en vol.
  • Le service « Two way Communication », qui donne à la personne en détresse la possibilité d’interagir avec les centres de secours.

Chiara Scaleggi, Sylvain Delattre et Maxime Fontanier, vous êtes membres de l’équipe SAR/Galileo du CNES. Quel est votre rôle ?

Chiara Scaleggi : Ingénieure en télécommunication de formation, j’ai été responsable système du projet Cospas/Sarsat avant de prendre le poste de chef de projet SAR/Galileo au CNES. J’ai la chance d’animer une belle équipe, dynamique et passionnée dans un contexte en pleine évolution au service de la Commission Européenne et de l’Agence de l’Union Européenne pour les Programmes Spatiaux (EUSPA, ex- GSA).

Sylvain Delattre : J’occupe le poste de responsable des opérations du projet SAR/Galileo, mon rôle est de garantir la disponibilité et le niveau de service du système en interface avec les partenaires européens qui participent au projet. De plus, je prépare l’arrivée des futurs services, considérés stratégiques pour le CNES.

Maxime Fontanier : Ingénieur en Informatique, je suis arrivé au CNES en 2010 au sein de la Direction du Système d’Information. En 2017, je suis devenu le chef de projet Return Link et depuis quelques mois j’occupe le poste de responsable Ingénierie du projet SAR/Galileo. Je suis le garant de l’ensemble des évolutions du système tout en préservant ses excellentes performances.

Depuis 2017, le projet SAR/Galileo prépare l’arrivé de la fonctionnalité Return Link (RLF), qui permet d’indiquer à la personne en détresse que son signal a bien été reçu. Pouvez-vous nous en dire plus sur le rôle du CNES dans ce nouveau service ?

Chiara Scaleggi : Le CNES a été désigné par la Commission Européenne et l’EUSPA, comme l’entité chargée de la fourniture du service Return Link, qui permet à l’utilisateur de recevoir un acquittement de la bonne réception et localisation de son alerte, via le système Galileo. Il a été démontré que cette fonctionnalité a un impact psychologique très positif sur les personnes en détresse qui l’utilisent.

Les moyens permettant la fourniture du service Return Link sont hébergés au CNES et opérés par les équipes qui travaillent sur le projet SAR/Galileo. Depuis la déclaration du service Return Link, officialisée en Janvier 2020 par la Commission Européenne, le CNES a également aidé les fabricants de balises européens et internationaux à la qualification technique des nouvelles balises.

Désormais, des balises de détresse embarquant la fonctionnalité Return Link sont disponibles sur le marché européen.

Excellente nouvelle ! Et peut-on se procurer une balise personnelle ?

Chiara Scaleggi : Il existe effectivement différents types de balises dont les balises « personnelles » dites PLB (Personal Locator Beacon) qui embarquent la fonctionnalité Return Link. Ces balises font la taille d’un téléphone portable et sont destinées au grand public, par exemple pour des activités de loisir (plaisance, randonnée, sports aériens, etc..).

Il faut souligner que le service SAR/Galileo est gratuit et garanti partout dans le monde. C’est un véritable atout par rapport aux services privés. Seule la balise est payante : chaque distributeur national donnera son prix et sa politique commerciale ; mais dans l’ensemble, vous pourrez vous en procurer une pour quelques centaines d’euros.

Le groupe français Orolia Maritime est le premier fournisseur à avoir développé et certifié une balise de ce type, pour des applications terrestres et maritimes. Cette nouvelle balise est appelée Fast Find Return Link et elle est déjà disponible à l’achat dans plusieurs pays européens. En France, c’est le distributeur Navicom qui est chargé de la commercialisation de ce modèle.
Par ailleurs, Orolia travaille au lancement commercial d’une balise aéronautique compatible avec le service Return Link, appelée Kannad Ultima-S. Cette balise a été désignée pour être installée dans les cabines des avions ou intégrée dans les radeaux de sauvetage.

D’autres sociétés françaises, comme ECA Group, sont impliquées dans le prototypage de balise Return Link de type aéronautique (ELT Emergency Locator Transmitter).

Quels sont les autres fonctionnalités potentielles que pourrait offrir le Service Return Link ?

Chiara Scaleggi : Le Service Return Link ne se limitera bientôt plus à un acquittement simple vers l’utilisateur. En effet, dans le cadre des projets Européen de recherche « H2020 », des prototypes permettant d’activer à distance une balise de détresse à bord d’un avion, via le Return Link SAR Galileo, ont été testés dans des conditions opérationnelles.

Maxime Fontanier : Ce service d’activation à distance, appelé « Remote Beacon Activation », a pour objectif de localiser les avions dont on ne connaîtrait plus la position. Actuellement le CNES est impliqué dans les tests de démonstration visant à prouver la valeur ajoutée de ce service pour les compagnies aériennes.
Par exemple, lors de la catastrophe du vol Malaysia Airlines MH370 en 2014, si l’avion avait été équipé de ce type de balise, la compagnie aurait pu demander une activation à distance et localiser l’avion en moins de deux minutes.

Air France et Ibéria se sont prêtées au jeu : embarquée à bord d’un avion pour un vol réel, la balise a été activée par les compagnies aériennes, déclenchant ainsi le signal de détresse qui a été repéré et localisé par le système Cospas/Sarsat. L’action inverse, à savoir la désactivation de la balise, a aussi été testée avec succès. Il y a donc deux systèmes en action dans cette manœuvre : le système SAR/Galileo et son Return link qui va permettre d’activer et désactiver la balise à distance ; accompagné du système Cospas/Sarsat, qui permet de rechercher et de secourir les appels de détresse à travers le monde.

Les retours d’expérience positifs des deux compagnies aériennes permettent d’enrichir les prochains développements des parties prenantes impliquées dans le projet, à savoir Orolia, mais aussi GSC Galileo Service Center, Cospas/Sarsat (FMCC (French Mission Control Center) et SPMCC (Spanish Mission Control Center), et plusieurs centres de secours RCC) et le CNES, qui est l’opérateur en charge de l’activation et la désactivation de la balise.

Cherchant constamment une amélioration des services pour l’utilisateur, des évolutions significatives du Service Return Link sont actuellement à l’étude. Parmi elles, le futur service Two Way communication. Quel est l’objectif de cette évolution ?

Sylvain Delattre : Le Two way Communication permettra la communication entre la balise émettrice du signal de détresse et le centre chargé de la mission de sauvetage sous la forme d’une série de questions et de réponses prédéfinies. Ces échanges d’information permettent au centre de secours de préciser le contexte de la détresse et d’améliorer les opérations de recherche.
C’est au consortium Serenity – composé de Telespazio France, du CNES, de Thales Alenia Space France, d’Orolia et de Pildo Labs – que la Commission Européenne a confié le projet de prototypage et de démonstration de ce nouveau service SAR/Galileo.
Dans le cadre de ce projet, le CNES joue un rôle clé dans la spécification du futur service et dans l’analyse des contraintes de sécurité. Il se positionne comme un acteur incontournable dans les applications de recherche et sauvetage liées au programme Galileo.

[VIDEO ) SAR/Galileo, car chaque minute compte !